Paris, 14 janvier 2025 – On le murmurait, c’est désormais confirmé : Arm Holdings, le géant discret qui irrigue le monde de la tech avec ses architectures de processeurs, prépare une offensive stratégique majeure. Au programme : une hausse substantielle des tarifs de ses licences et, coup de théâtre, la conception de ses propres puces. Une double manœuvre qui pourrait rebattre les cartes d’un secteur ultra-concurrentiel.
Reuters lève le voile ce mardi sur un projet ambitieux, baptisé « Picasso », nourri au sein d’Arm depuis 2019. L’objectif ? Gonfler le chiffre d’affaires annuel tiré des smartphones d’environ un milliard de dollars sur dix ans. Comment ? En augmentant drastiquement – jusqu’à 300% selon certaines sources – les royalties perçues sur les puces utilisant l’architecture Armv9, la dernière génération.
Une décision qui pourrait faire grincer des dents chez certains des plus gros clients d’Arm, tels que Qualcomm ou MediaTek. Cependant, les géants comme Apple et Qualcomm, capables de concevoir leurs propres cœurs de processeurs basés sur l’architecture Arm, seraient probablement protégés de ces hausses, forts de contrats préexistants. Un avantage stratégique qui illustre la complexité des relations au sein de l’écosystème Arm.
Ce virage stratégique s’inscrit dans une volonté d’Arm de monétiser plus efficacement sa position dominante. Bien que ses architectures soient omniprésentes dans les smartphones, les objets connectés et de plus en plus dans les serveurs, ses revenus restent modestes comparés à ceux de ses clients. En 2024, Arm affichait un chiffre d’affaires de 3,23 milliards de dollars. À titre de comparaison, les revenus matériels d’Apple, dont les produits reposent tous sur des puces basées sur l’architecture Arm, ont dépassé les 290 milliards de dollars. Une disproportion qui a sans doute motivé la réflexion stratégique chez Arm.
« L’ambition d’Arm est claire : transformer son modèle économique pour mieux refléter la valeur qu’elle apporte à l’industrie », analyse un expert du secteur. « Avec son quasi-monopole sur les instructions des processeurs d’application pour smartphones, Arm dispose d’un levier considérable pour renégocier ses contrats. »
Mais la véritable bombe réside dans l’autre volet de la stratégie d’Arm : la conception de ses propres puces. Une initiative audacieuse qui pourrait bouleverser l’équilibre des forces. En devenant à la fois architecte et fabricant, Arm se positionnerait en concurrent direct de ses propres clients, une situation inédite et potentiellement explosive. Cela lui permettrait de capter une part bien plus importante de la valeur ajoutée, au lieu de se contenter de royalties.
On imagine déjà les remous que cette annonce va provoquer dans l’industrie. Qualcomm, MediaTek, et les autres fondeurs, verront-ils d’un bon œil l’arrivée d’un nouveau compétiteur, aussi puissant soit-il ? La réponse à cette question et l’adaptation du marché aux nouvelles ambitions d’Arm promettent d’être passionnantes à observer dans les mois à venir. L’offensive d’Arm est lancée, et le monde des semi-conducteurs retient son souffle.