L’informatique quantique progresse rapidement et attire des investissements massifs comme celui de 170 millions de dollars pour Quantum Machines. Source : Bartlomiej Wroblewski / Getty Images via TechCrunch
L’informatique quantique, ce Graal technologique qui fait rêver les plus grands acteurs de la tech, franchit une nouvelle étape significative. Quantum Machines, startup israélienne spécialisée dans les solutions de contrôle quantique, vient d’annoncer une levée de fonds impressionnante de 170 millions de dollars en série C. Ce financement massif, l’un des plus importants jamais réalisés dans le secteur, a été mené par PSG Equity avec la participation d’Intel Capital, Red Dot Capital Partners et d’autres investisseurs historiques.
Une position stratégique unique dans l’écosystème quantique
Le montant exceptionnel de cette levée s’explique par l’approche ingénieuse de Quantum Machines. Plutôt que de s’engager dans la course à la construction d’ordinateurs quantiques, l’entreprise s’est positionnée comme fournisseur de technologies de contrôle quantique essentielles à tous les acteurs du secteur.
Selon Dr. Itamar Sivan, PDG et co-fondateur de l’entreprise avec Dr. Yonatan Cohen (CTO) et Dr. Nissim Ofek (ingénieur en chef), leur technologie est désormais utilisée par plus de la moitié de toutes les entreprises mondiales travaillant sur l’informatique quantique.
« Nous servons toutes les catégories d’entreprises du secteur. Des grandes entreprises aux startups construisant des ordinateurs quantiques, en passant par les laboratoires nationaux et les universités du monde entier. »
Cette approche agnostique fait de Quantum Machines un acteur incontournable, quelle que soit la technologie quantique qui finira par s’imposer. C’est précisément ce qui a séduit les investisseurs.
Le matériel de Quantum Machines s’est notamment fait connaître pour son partenariat avec Nvidia, visant à réduire les erreurs dans la recherche quantique. Un défi majeur, puisque les ordinateurs quantiques actuels présentent des taux d’erreur élevés qui limitent leur utilité pratique.
Mais l’entreprise ne se limite pas à servir les constructeurs d’ordinateurs quantiques. Parmi ses centaines de clients figurent également des banques et d’autres organisations qui mènent des recherches sur des machines tierces, dans le cloud, et utilisent les solutions de Quantum Machines pour maintenir ces travaux sur la bonne voie.
Bien que Dr. Sivan ait refusé de divulguer la valorisation précise de l’entreprise suite à cette levée, il a confirmé qu’elle représentait une « augmentation significative » par rapport aux tours précédents. Selon plusieurs sources, le montant initial visé était de 100 millions de dollars, mais la levée a finalement été sursouscrite, témoignant de l’engouement des investisseurs.
Un secteur quantique en pleine effervescence
Cette levée de fonds intervient dans un contexte contrasté pour l’informatique quantique. En janvier dernier, Jensen Huang, PDG de Nvidia, avait provoqué une onde de choc en déclarant publiquement que cette technologie était encore « à des décennies » d’une utilisation pratique, faisant chuter les actions des entreprises du secteur.
Pourtant, les signaux positifs se sont multipliés depuis. Sundar Pichai, PDG de Google, qui a dévoilé en décembre une puce quantique baptisée Willow, a récemment estimé qu’un délai réaliste pour des ordinateurs quantiques « utiles » serait de cinq à dix ans.
Microsoft a suivi la semaine dernière en dévoilant son propre processeur quantique, construit à l’aide de ce qu’il décrit comme « un nouvel état de la matière » appelé particule de Majorana. Si certains physiciens ont exprimé des doutes quant aux affirmations de Microsoft en raison d’un manque de preuves, cette annonce souligne néanmoins l’intensité des recherches dans le domaine.
En parallèle, plusieurs startups ont réalisé d’importantes levées de fonds ces derniers mois :
- Alice & Bob, entreprise française spécialisée dans les qubits « chat » de Schrödinger, a levé 104 millions de dollars
- QuEra, startup soutenue par Google, a obtenu 230 millions de dollars sous forme d’emprunt convertible
Une position stratégique indépendante des approches techniques
L’un des défis majeurs du secteur reste la diversité des approches théoriques. Plusieurs technologies concurrentes sont en développement, sans qu’aucune ne se soit encore imposée comme la voie royale vers l’ordinateur quantique pratique.
C’est précisément là que réside l’intelligence stratégique de Quantum Machines : en se positionnant comme fournisseur de technologies de contrôle agnostiques, l’entreprise s’affranchit de ces questions et peut servir tous les acteurs, quelle que soit leur approche théorique.
« Au cours des dernières années, le rythme des percées technologiques dans l’informatique quantique s’est considérablement accéleré, » explique Rotem Shacham, directrice chez PSG. « Nous nous rapprochons de valeurs utilisateur concrètes. Nous n’aimons pas investir à des décennies de distance. Mais avec Quantum Machines, le marché est déjà là. »
Cette position unique de « médiateur réduisant le bruit » dans l’écosystème quantique explique l’attractivité de Quantum Machines pour les investisseurs, dans un secteur où la course est lancée mais dont l’arrivée reste incertaine.
Pour l’entreprise israélienne, l’enjeu est désormais de consolider sa position dominante dans les technologies de contrôle quantique, alors que les géants de la tech et de nombreuses startups accélèrent leurs efforts pour faire de l’ordinateur quantique une réalité commerciale accessible. Avec 170 millions de dollars en poche, elle dispose désormais des ressources nécessaires pour accompagner cette révolution technologique en marche.