Un géant du web convoite le navigateur le plus populaire au monde
C’est une annonce qui fait l’effet d’une bombe dans le monde de la tech : Yahoo se positionne officiellement comme acheteur potentiel du navigateur Chrome si Google devait être contraint de s’en séparer. Cette information a été révélée hier par Brian Provost, directeur général de Yahoo Search, lors de son témoignage dans le cadre du procès antitrust qui oppose Google au Département de la Justice américain.
Selon Provost, Yahoo – soutenu par son propriétaire Apollo Global Management – estime que la valeur du navigateur Chrome se chiffrerait en « dizaines de milliards de dollars ». Une somme colossale qui reflète l’importance stratégique de ce navigateur qui détient actuellement près de 65% des parts de marché mondial.
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Un procès antitrust aux enjeux considérables
Cette annonce intervient dans un contexte juridique particulièrement tendu pour Google. Le Département de la Justice américain et plusieurs États ont engagé des poursuites contre la firme de Mountain View, l’accusant de maintenir un monopole illégal dans le secteur de la recherche en ligne.
Au cœur de ce litige se trouve la question de l’intégration verticale de Google. Les procureurs estiment que la position dominante du navigateur Chrome, couplée aux accords de préinstallation du moteur de recherche Google sur de nombreux appareils, constitue une barrière à l’entrée insurmontable pour les concurrents. Le démantèlement de l’empire Google via la cession forcée de Chrome représenterait une solution radicale à ce problème de concurrence.
Cette procédure judiciaire n’est pas sans rappeler le célèbre procès Microsoft des années 1990, qui avait abouti à la séparation d’Internet Explorer du système d’exploitation Windows. À l’époque, cette décision avait profondément modifié le paysage du web.
Les implications stratégiques pour Yahoo
Pour Yahoo, l’acquisition de Chrome représenterait un retour spectaculaire sur le devant de la scène tech. Autrefois géant incontesté d’internet, Yahoo a connu des années difficiles avant d’être racheté par le fonds d’investissement Apollo Global Management en 2021 pour 5 milliards de dollars.
L’entreprise voit dans Chrome une opportunité unique de reprendre pied dans un marché stratégique. Avec plus de 3,3 milliards d’utilisateurs à travers le monde, le navigateur de Google offrirait à Yahoo une plateforme incomparable pour relancer son moteur de recherche et développer de nouveaux services.
Les analystes estiment que cette acquisition pourrait transformer radicalement l’équilibre des forces dans l’écosystème internet. David Kirkpatrick, fondateur de Techonomy Media, explique : « Si Yahoo parvenait à mettre la main sur Chrome, nous assisterions à un bouleversement majeur dans l’industrie. Cela repositionnerait instantanément Yahoo comme un acteur central du web moderne. »
Un marché des navigateurs en pleine mutation
L’intérêt de Yahoo pour Chrome s’inscrit dans un contexte plus large de recomposition du marché des navigateurs web. Alors que Chrome domine largement le secteur, d’autres acteurs tentent de se positionner sur des niches spécifiques :
Navigateur | Part de marché | Points forts |
---|---|---|
Chrome | 65,3% | Écosystème Google, performances |
Safari | 18,7% | Intégration Apple, vie privée |
Edge | 4,3% | Intégration Windows, IA |
Firefox | 3,1% | Open source, personnalisation |
Opera | 2,2% | Fonctionnalités intégrées |
Autres | 6,4% | Niches spécifiques |
Une éventuelle cession de Chrome pourrait rebattre complètement les cartes de ce marché. Des rumeurs circulent déjà sur l’intérêt potentiel d’autres grands acteurs technologiques, notamment OpenAI, qui verrait dans Chrome un canal de distribution idéal pour ses technologies d’intelligence artificielle.
Les prochaines étapes du procès
Le témoignage de Brian Provost n’est qu’une étape dans un processus judiciaire qui s’annonce encore long. Le juge Amit Mehta, qui préside ces audiences, devra déterminer si Google a effectivement enfreint les lois antitrust américaines, puis définir les remèdes appropriés.
Les experts juridiques estiment qu’une décision finale pourrait intervenir d’ici la fin de l’année 2025, mais les procédures d’appel pourraient prolonger considérablement ce calendrier. Si le tribunal ordonnait effectivement la cession de Chrome, un processus de vente supervisé serait alors mis en place.
Pour Google, l’enjeu est crucial. Chrome ne représente pas seulement un produit phare de son écosystème, mais aussi un point d’entrée privilégié vers ses services et une source précieuse de données utilisateurs. La firme a déjà fait savoir qu’elle contesterait vigoureusement toute tentative de démantèlement.
Kent Walker, directeur juridique de Google, a récemment déclaré : « Séparer Chrome du reste de notre écosystème nuirait à l’innovation et dégraderait l’expérience utilisateur. Nous sommes convaincus que le tribunal reconnaîtra les bénéfices pour les consommateurs de notre modèle intégré. »
Qu’il s’agisse de Yahoo ou d’un autre acquéreur potentiel, la vente forcée de Chrome constituerait l’un des plus importants transferts d’actifs technologiques de l’histoire récente. Un événement qui pourrait redessiner durablement le paysage numérique mondial.